Le feu et l’ombre

Au cœur d’un fil de discussion sur Facebook, autour du bareback et de la prise de risque chez les pédés, Hélène Hazera, dont la culture encyclopédique force le respect et l’humilité, concluait son argumentation par cette phrase : «Et nous tournons en rond dans le noir, dévorés par le feu.»

L’incandescence de ces mots m’a cueilli, j’ai été tellement impressionné que j’en ai pleuré, bêtement, de jalousie de savoir que quelqu’un pouvait écrire une phrase aussi belle et de fièvre en reconnaissant dans ces mots le rapport des pédés au sexe. J’ai emprunté la piste qu’Hélène avait laissé, angéliquement, à la fin de son commentaire et internet m’a permis de comprendre, malgré mon inculture, d’où venait cette phrase.

In girum imus nocte et consumimur igni — Nous tournons en rond dans le noir et nous sommes dévorés par le feu — est le titre du film de 1978 de Guy Debord, dans lequel il reprend les idées de son livre de 1967, La société du spectacle. Le film est présent sur le web:

Hélène avait écrit sur le mouvement situationniste dans Libération, entre autre dans Les dernières projections de Guy Debord.

Le titre en latin, un palindrome, est un vers de Virgile, qui, depuis son tombeau, nous a laissé une phrase brûlante de toute sa sombre lucidité : Nous tournons en rond dans le noir et nous sommes dévorés par le feu.


Publié

dans

Commentaires

3 réponses à “Le feu et l’ombre”

  1. Avatar de le roncier
    le roncier

    Merci de ces précisions, Alex :)

  2. Avatar de alex
    alex

    Le titre du film de Debord se traduirait plutôt comme “Nous tournons en rond dans la nuit (et non dans le noir) et nous sommes dévorés par le feu”.
    Ce titre n’est pas tiré de Virgile (malgré ce qu’en dit, sans preuves, le web) mais semble plutôt provenir d’un jeu dans les monastères au Moyen Age, le palindrome étant alors un des exercices favoris des moines. La légende assure même que dans cette recherche du palindrome parfait, certains de ces moines sont devenus fous

  3. Avatar de Le Yéti

    Magnifique cette phrase… encore plus en latin. Merci pour la découverte !