Je me rappelle précisément, enfant, regarder Dalida chanter à la télé en robe rose à froufrous et me tourner vers ma mère pour demander pourquoi les gens n’aimaient pas Dalida, elle était super pro et s’habillait super bien pourtant.
Je me souviens, enfant encore, voir les pubs dans le métro et me tourner vers ma mère pour lui demander pourquoi on voyait que des femmes nues, et pas des hommes. Cette question était intéressée; une autre question se tapissait derrière, une question que je mettrais des années encore à formuler. Cette question sera : Pourquoi ai-je envie de voir des hommes nus? Pour l’instant, Béa avait soupiré, parce que j’ai dû lui poser des centaines de questions chiantes dans ma vie et elle m’avait répondu que c’était une habitude culturelle.
Petit pédé, trop jeune pour pouvoir se défendre en posant les bonnes questions, assez vieux pour ressentir la condamnation sociale du camp populaire de Dalida et du désir du corps des hommes. Petit pédé et la réification des femmes, qu’on préfère habillées d’une certaine façon lorsqu’elles chantent et qu’on veut nues lorsqu’il s’agit de vendre. Petit pédé et sa maman face au détournement cognitif de l’hétéropatriarcat, déjà.
Tu sais, je regarde encore les hommes, me confiera Béa, bien plus tard, en replaçant une mèche de ses cheveux désormais blancs. Leurs mains, parfois leurs chevilles. Je ne sais pas si c’est normal, ajoute-t-elle.
J’ai jamais été très réchauffé par le normal, tu sais, je réponds, à la question qu’elle ne m’a pas adressée. Je pense que tu fais bien ce que tu veux, je dis. Les gens préfère penser que le désir meurt avec l’âge, surtout chez les femmes seules et indépendantes, mais évidemment que non. Heureusement que non. Moi aussi, je regarde encore les hommes, parce qu’ils sont beaux. Même s’ils mentent.
Commentaires
2 réponses à “Les grandes questions”
Tu es un homme, donc tu mens également ? :)
#NotAllMen ! ;) Bien sûr que je mens, souvent par omission, en voulant oublier mes privilèges que me confèrent ce statut d’homme. Mais j’ai aussi ce pied de l’autre côté du miroir, étant pédé.