Le lien entre invisibilisation (ou “omission”) du féminin dans la langue et dans la société paraît évident. En revanche, aucune féministe ne prétend que modifier la langue permettrait, de manière quasi-magique, de faire évoluer la société. Ce serait une position aussi naïve que l’argument Ô combien de fois entendu: “il faut d’abord faire évoluer la société, la langue suivra d’elle-même”. La plupart des gens refusant que l’on “touche” à la langue ne sont pas d’immondes misogynes; leur problème, c’est que l’on révèle le politique dans leur langue, qu’on lui retire son enrobage “naturel” et qu’on mette en évidence l’idéologie qui y est à l’oeuvre.
Il faut donc féminiser la langue, c’est-à-dire mettre fin à l’invisibilité du féminin. Pour cela, plusieurs solutions sont possibles. Personne n’a jamais été forcé de les utiliser; au contraire, tout au plus les instances de pouvoir formulent-elles des “recommandations” ou des “directives” pour la féminisation de la langue, avec l’efficacité que l’on sait. En voici quelques-unes, telles que j’essaie de les appliquer dans la vie de tous les jours. Je parlerai ensuite d’une solution qui permet de dépasser le binarisme masculin/féminin.
” Féminisation de la langue: quelques réflexions théoriques et pratiques, Genre!.
Des exemples et des solutions, et une autre proposition dans ce (vieux) post de Virgile:
Est paru dans Le Monde cette semaine un article très intéressant sur la revendication féministe de supprimer la règle grammaticale qui veut que le masculin l’emporte sur le féminin. L’argument est convaincant : cette règle de suprématie du masculin ayant été instaurée assez récemment pour des motifs purement sexistes, il n’est pas idiot de vouloir la supprimer maintenant que notre société a progressé sur le plan de l’égalité des sexes. Nous reviendrions alors à la règle qui prévalait auparavant, issue du latin et du grec, dite règle de proximité. Levée de bouclier généralisée dans les commentaires, bien sûr, de la part de tous ceux pour qui le français est sacré et intouchable. Comme si on avait parlé la même langue depuis Clovis 1er jusqu’à nos jours… Des pays comme le Brésil sont moins frileux que nous, qui réforment couramment l’orthographe de leur langue (suppression des doubles consonnes par exemple) pour l’adapter aux usages de la population.
” Jeux de langue, Ad Virgilium.
Anecdote: Quand j’étais à Act Up-Paris, une personne avait appelé la permanence et demandé «le ou la responsable de la grammaire non sexiste»: Elle avait remarqué que depuis plusieurs années, nous utilisions un E majuscule pour «féminiser» notre communication, comme dans «vivantEs», par exemple. Personne n’a su quoi lui répondre.