L’automatisation commence à détruire l’emploi, comme si la vieille peur du 19ème siècle devenait réalité. A l’époque, il y avait cette inquiétude énorme que l’emploi des gens ordinaires était menacé par le progrès des machines. Quand les voitures ont remplacé les chevaux, les gens pensaient que cela devenait tellement facile de conduire qu’il n’y aurait plus de raison de payer pour le transport. Tous ceux qui travaillaient avec les chevaux allaient perdre leur emploi. Mais les syndicats étaient puissants. Ils ont imposé qu’il est normal de payer quelqu’un même si le travail est moins pénible et qu’il est plus facile de conduire un taxi que de s’occuper de chevaux.
Avec l’Internet, les choses deviennent tellement faciles que les gens rejettent cet arrangement payant. C’est une erreur. Cela a commencé avec Google, qui a dit: on vous donne un moteur de recherche gratuit. En contrepartie, votre musique, vos photos, vos articles vont aussi être gratuits. L’idée est que ça s’équilibre : vous avez moins de revenus mais vous avez accès à des services gratuits. Le problème est que ce n’est pas équilibré. bientôt, les consommateurs vont accéder aux produits grâce aux imprimantes 3D. Graduellement toutes les choses physiques deviennent contrôlées par les logiciels et tout devient gratuit.
(…)Les compagnies qui font de la traduction automatique collectent des millions et des millions d’exemples de documents qui ont été traduits par des vraies personnes. Ils repèrent des morceaux de phrases qui sont semblables à ceux de votre document et ils traduisent un peu à la fois et assemblent le patchwork. Cela ressemble à un cerveau électronique gigantesque mais en fait, il s’agit du travail de tonnes de gens qui ne sont pas payés et ne savent même pas qu’ils sont utilisés.
Pour chaque nouvelle technologie qui prétend remplacer l’humain, il y a en fait des gens derrière le rideau. Ce que je dis, c’est qu’il y a une solution : il faut garder trace des gens qui fournissent un vrai travail et avoir une option qui leur permette d’être indemnisés. L’automatisation dépend systématiquement de ce que nous appelons « big data » ou informations produites par un nombre élevé de gens. Ces données ne viennent pas des anges ou de phénomènes surnaturels. Elles viennent des gens. Si on les payait pour ces données, on pourrait soutenir l’emploi.
» Jaron Lanier: l’Internet ruine la classe moyenne, Big Picture, Le Monde.
Commentaires
Une réponse à “Automatisation, travail et gratuité”
Intéressant mais sacré sujet… —_õ